3 minutes de lecture | 6 janvier 2024

La quotité disponible

La quotité disponible, avec la réserve héréditaire, est définie de manière simple par le Code civil en son article 912 :

« La réserve héréditaire est la part des biens et droits successoraux dont la loi assure la dévolution libre de charges à certains héritiers dits réservataires, s’ils sont appelés à la succession et s’ils l’acceptent.

La quotité disponible est la part des biens et droits successoraux qui n’est pas réservée par la loi et dont le défunt a pu disposer librement par des libéralités. »

La compréhension de la quotité disponible et de la réserve héréditaire est cruciale dans le droit des successions et du patrimoine. Ces concepts influencent directement la planification successorale et peuvent avoir un impact significatif sur la répartition de l’héritage. En cas de désaccord, il peut être nécessaire de contester un testament ou de faire face à un recel successoral. Pour naviguer dans ces eaux complexes, le rôle d’un avocat spécialisé est essentiel, notamment pour débloquer une succession complexe et assurer une liquidation de succession équitable et conforme à la loi.

C’est donc à partir de la réserve héréditaire que peut être appréhendée la quotité disponible, c’est la différence entre la masse totale des biens et droits successoraux et la part des biens et droits successoraux appartenant à la réserve.

Ce qui veut dire également qu’en l’absence des héritier dits héritiers réservataires, il n’y a ni réserve ni quotité disponible et que le défunt a pu tester en toute liberté (cf. ci-dessous art. 916 du Code civil).

Rappelons que les héritiers réservataires sont uniquement les enfants du défunt (ou leurs descendants en cas de prédécès) et le conjoint survivant seulement en l’absence de descendants.

Le quantum de la réserve, donc de la quotité disponible, varie en fonction de la dévolution successorale :

« Les libéralités, soit par actes entre vifs, soit par testament, ne pourront excéder la moitié des biens du disposant, s’il ne laisse à son décès qu’un enfant ; le tiers, s’il laisse deux enfants ; le quart, s’il en laisse trois ou un plus grand nombre.

L’enfant qui renonce à la succession n’est compris dans le nombre d’enfants laissés par le défunt que s’il est représenté ou s’il est tenu au rapport d’une libéralité en application des dispositions de l’article 845 du Code civil

 

Lorsque le défunt ou au moins l’un de ses enfants est, au moment du décès, ressortissant d’un Etat membre de l’Union européenne ou y réside habituellement et lorsque la loi étrangère applicable à la succession ne permet aucun mécanisme réservataire protecteur des enfants, chaque enfant ou ses héritiers ou ses ayants cause peuvent effectuer un prélèvement compensatoire sur les biens existants situés en France au jour du décès, de façon à être rétablis dans les droits réservataires que leur octroie la loi française, dans la limite de ceux-ci. »

Art. 913 du Code civil

« Sont compris dans l’article 913, sous le nom d’enfants, les descendants en quelque degré que ce soit, encore qu’ils ne doivent être comptés que pour l’enfant dont ils tiennent la place dans la succession du disposant. »

Art. 913-1 du Code civil

« Les libéralités, par actes entre vifs ou par testament, ne pourront excéder les trois quarts des biens si, à défaut de descendant, le défunt laisse un conjoint survivant, non divorcé.

Art 914-1

A défaut de descendant et de conjoint survivant non divorcé, les libéralités par actes entre vifs ou testamentaires pourront épuiser la totalité des biens. »

Art.916

Ces articles n’indiquent pas comment on calcule la quotité disponible et la réserve, ni comment elle est répartie.

Le calcul de la quotité disponible et de la réserve

La quotité disponible

C’est au sujet de la réduction des libéralités excédant la quotité disponible qu’est expliquée la manière de calculer cette dernière :

« La réduction se détermine en formant une masse de tous les biens existant au décès du donateur ou testateur.

Les biens dont il a été disposé par donation entre vifs sont fictivement réunis à cette masse, d’après leur état à l’époque de la donation et leur valeur à l’ouverture de la succession, après qu’en ont été déduites les dettes ou les charges les grevant. Si les biens ont été aliénés, il est tenu compte de leur valeur à l’époque de l’aliénation. S’il y a eu subrogation, il est tenu compte de la valeur des nouveaux biens au jour de l’ouverture de la succession, d’après leur état à l’époque de l’acquisition. Toutefois, si la dépréciation des nouveaux biens était, en raison de leur nature, inéluctable au jour de leur acquisition, il n’est pas tenu compte de la subrogation.

On calcule sur tous ces biens, eu égard à la qualité des héritiers qu’il laisse, quelle est la quotité dont le défunt a pu disposer. »

Art.922 du Code civil

Soit la moitié s’il laisse un descendant, le tiers s’il en laisse deux, le quart s’il en laisse trois ou plus ou seulement un conjoint survivant.

Le partage de la quotité disponible

Beaucoup de testateurs lèguent à l’un de leurs descendants ou à un tiers la quotité disponible.

Il est noté au passage que le legs de la quotité disponible équivaut à un legs universel, ce qui sera expliqué à l’article relatif à la délivrance de legs.

Ce legs peut cependant n’être une promesse de gascon qui n’engage que celui qui y croit !

En effet, la quotité disponible qui tient compte des donations antérieures peut être anéantie par celles-ci si elles ont été importantes au regard de l’actif successoral, nous verrons comment infra.

C’est donc un bon moyen de se débarrasser d’un importun qui vous harcèle pour être couché sur votre testament !

Comme nous venons de le voir, au moment du décès, on fait une masse de tous les biens présents à l’ouverture de la succession auxquels on ajoute en valeur celle des biens donnés, puis on calcule le montant de la quotité disponible en divisant cette masse par deux, trois ou quatre, selon la dévolution successorale.

A cette quotité disponible, on fera des imputations :

  • celle des biens donnés dans l’ordre chronologique,
  • celle des legs,
  • celle des donation en avancement d’hoirie ayant dépassé la part de réserve du donataire,
  • dans certains cas, les droits du conjoint survivant (le conjoint survivant ne pouvant exercer de droits en pleins propriété que sur la quotité disponible, voir notre article sur les droits successifs du conjoint survivant)

Si la quotité disponible n’a pas été épuisée, elle est partagée entre les héritiers réservataires au prorata de leurs droits successifs.

Tout cela est précisé par le Code civil :

« Il n’y aura jamais lieu à réduire les donations entre vifs, qu’après avoir épuisé la valeur de tous les biens compris dans les dispositions testamentaires ; et lorsqu’il y aura lieu à cette réduction, elle se fera en commençant par la dernière donation, et ainsi de suite en remontant des dernières aux plus anciennes. »

Art. 923 du Code civil

« Lorsque la libéralité excède la quotité disponible, le gratifié, successible ou non successible, doit indemniser les héritiers réservataires à concurrence de la portion excessive de la libéralité, quel que soit cet excédent.

Le paiement de l’indemnité par l’héritier réservataire se fait en moins prenant et en priorité par voie d’imputation sur ses droits dans la réserve. »

Art. 924 du Code civil

« Le montant de l’indemnité de réduction se calcule d’après la valeur des biens donnés ou légués à l’époque du partage ou de leur aliénation par le gratifié et en fonction de leur état au jour où la libéralité a pris effet. S’il y a eu subrogation, le calcul de l’indemnité de réduction tient compte de la valeur des nouveaux biens à l’époque du partage, d’après leur état à l’époque de l’acquisition. Toutefois, si la dépréciation des nouveaux biens était, en raison de leur nature, inéluctable au jour de leur acquisition, il n’est pas tenu compte de la subrogation.»

Art. 924-2 du Code civil

« Lorsque les dispositions testamentaires excéderont soit la quotité disponible, soit la portion de cette quotité qui resterait après avoir déduit la valeur des donations entre vifs, la réduction sera faite au marc le franc, sans aucune distinction entre les legs universels et les legs particuliers. »

Art. 926 du Code civil

« Néanmoins dans tous les cas où le testateur aura expressément déclaré qu’il entend que tel legs soit acquitté de préférence aux autres, cette préférence aura lieu ; et le legs qui en sera l’objet ne sera réduit qu’autant que la valeur des autres ne remplirait pas la réserve légale. »

Ces dispositions imposent au notaire des calculs assez complexes, source de litiges entre les héritiers, causés particulièrement par le montant des rapport et l’imputation des libéralités.

L’acte de partage doit être attentivement scruté par un professionnel aguerri et le conseil d’un avocat expérimenté en matière de successions est vivement recommandé dans ces circonstances.

Actualités récentes sur la quotité disponible et les successions

  • Réforme du droit successoral en 2023 : Depuis le 1er janvier 2023, de nouvelles règles sont entrées en vigueur concernant les successions. La quotité disponible a été augmentée dans certains cas, permettant une plus grande liberté de transmission du patrimoine.
  • Modification des réserves héréditaires : Les parts réservées aux héritiers ont été réduites, ce qui accroît la part dont on peut disposer librement. Par exemple, en présence de deux enfants, la quotité disponible est désormais d’1/3 du patrimoine.
  • Suppression de la réserve héréditaire des parents : Si une personne décède sans descendant, ses parents n’ont plus droit à une réserve héréditaire. Cela permet de désigner plus facilement un conjoint ou un partenaire comme unique héritier.
  • Proposition de loi pour faciliter les donations : Une proposition de loi datant de juillet 2023 vise à faciliter les transmissions entre générations. Elle suggère notamment d’augmenter l’abattement pour les donations aux petits-enfants, le portant de 31 865€ à 100 000€, soit le même montant que pour les enfants.
  • Maintien des barèmes fiscaux en 2025 : Les barèmes des droits de succession et de donation pour 2025 sont restés identiques à ceux de 2024, faute de nouvelle loi de finances votée fin 2024.
  • Augmentation du plafond pour les frais d’obsèques : Depuis le 1er janvier 2025, le montant maximal pouvant être prélevé sur le compte du défunt pour les frais d’obsèques a été relevé à 5 910€, contre 5 000€ auparavant.

Ces évolutions récentes témoignent d’une tendance à assouplir les règles de transmission du patrimoine, tout en maintenant un équilibre entre la liberté du testateur et la protection des héritiers.

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